L’inspectrice Shift est sur le coup avec sa cape et une musique à l’œil d’Isaac Eyes. Etude au microscope de la police scientifique[1]. Les multiples pièges sont inopérants. Un autre jour, tant par un coup, juste un det=clapoton=apôtre=salsifi=pilon=doigt a été retrouvé entouré d’une nappe de musique insistante. Il sera enfermé dans un sac en sous scellé en papier kraft, avec une étiquette beige. Shift zoome. L’hypothèse du yakuza est écartée. Qui a fait du raisiné=boudin alors ? Pour avoir les idées claires, l’inspectrice Shift table sur Ctrl + Shift + B. Sur sa table de chevet trône l’essai Upon the Tracing of Footsteps publié par Sherlock Holmes en 1878, dont l’existence est contestée depuis le Ex bibliotheca holmesiana de Tage de la Cour (1951).
– Quel est le motif ? S’interroge le Commissaire Maigrelet© en cure d’amaigrissement pour éviter le diabète de type 2.
– Les carreaux sur la nappe entourant le doigt, mais je ne vois pas le rapport répond du tac au tac et imperturbablement l’Inspectrice Shift.
L’inspection générale des bibliothèques, impuissante lors de la prise de pouvoir du F.N. sur la bibliothèque de Vitrolles – où des revues de gauche, de nombreux livres ont été exclus -, suite à l’élection municipale démocratique à deux tours après le mandat d’un maire socialiste pourri, a mené une enquête non aboutie. Elle n’a pas été plus efficace concernant les vols à la bibliothèque Doucet.
Dans son rapport, l’inspection expose que la première médiathèque en France, créée sans doute grâce à une collection unique d’emballages de carrés de sucre, y compris la famille de Louis Malle, est née en 1977 dans la ville de Verlaine et Koltès[2]. Si les bibliothèques en tous genres ont rattrapé, grâce à des maires riches et soudainement entichés, dans les années 80-90, leur retard sur celles anglo-saxonnes, germanophones, scandinaves et japonaises, tout a été vite perdu depuis. Plus besoin de faire tourner, comme les voitures de fonction ou estafettes de policier ou camions de l’armée, les bibliobus à vide dans le froid hivernal pour remplir les quotas d’essence utilisés façon GOSPLAN – technique somme toute peu écologique. Les réseaux perdent leur cohérence pourtant durement acquise, l’achat de livres diminue nettement, mouvement inauguré par un maire vert, par delà Malraux et Lang qu’il trouve éculé sans proposition alternative crédible et consensuelle, des bibliothèques sont fermées comme en Angleterre au nom de la rentabilité à cause de l’endettement à long terme. Les bibliothèques appartiennent à un milieu désormais sinistré.
Le rapport poursuit sur le poncif consistant à affirmer constamment que la bibliothécaire lit sur place mais – révélation – elle n’a pas le temps. Les étudiant.e.s sous payé.e.s comme moniteurs, -trices, une main d’œuvre bon marché qui permet de mettre du beurre dans leurs maigres épinards, concurrençant le personnel titulaire et contractuel, lit beaucoup in situ et travaille ses cours sur place. La mémoire se perd car les archives électroniques sont trop onéreuses, concernant le rétroactif profond ou temps long, et les documents en papier sont progressivement mis au pilon=jetés par manque de place suite à récolement=inventaire et désherbage=tri annuel, en général lors de canicule, les étudiants ayant terminés leurs cours ou épreuves, et la poussière. A part les bibliothèques patrimoniales[3], la mémoire s’efface progressivement à cause des coûts et de la surface. ROM RAM. La pâte à papier à partir de bois, la pulpe d’où pulp, s’autodétruit à cause de l’acidité ; la numérisation cède face à la migration des données. Notre civilisation est en danger. Le cadavre bouge encore.
Toujours selon le rapport, les chercheurs consultent uniquement des articles en ligne depuis chez eux. L’anglo-saxon prédomine. Les chercheurs sont rarement présents en -thèque. En terme de bibliométrie, fondée uniquement sur le quantitatif, donc biaisée, les chercheurs, obsédés, comme les influenceurs, par leur popularité par leurs pairs=impact factor, payent pour publier – publish or perish – en plus de leur laboratoire=double vol et parfois truandent le système en s’autocitant à l’infini[4] et/ou truquent les mots-clés de leurs articles. Ce sont les chercheurs en physique théorique du CERN qui ont développé le modèle de la toile, du web, avec ArXive, un prix décerné à leurs yeux. Les européens se sont regroupés trop lentement, en des groupes de négociations dits Couperin, pour pouvoir peser contre des entreprises privées – Elsevier, Wiley, etc. -, qui entendent la seule musique du profit, gérant des journaux essentiellement électroniques dans des bases de données chères impliquant un achat moindre de revues papier. Les -thèques sont prises à la gorge, le public aussi. Un directeur, ancien Mao et peu chanteur, a confié la numérisation des documents de sa bibliothèque à Google® – désormais propriétaire -, suscitant un débat national pour lequel un directeur médiatique d’une grande bibliothèque, placé là par appuis politiques, qui se tapait sa secrétaire, monta sur ses ergots afin de s’assurer sa propre publicité en une virginité bienvenue – bien longtemps que la secrétaire avait vu péter le loup-garou.
Le rapport poursuit. Rétifs au globish imposé, les étudiant.e.s de première année, souvent nul.le.s en langue, sont féru.e.s de livres de référence imposés dans des bibliographies prescrites par des profs – auxquel.le.s ilelis se cantonnent bêtement pour une efficacité supplantant la curiosité -, téléchargent des articles uniquement en français. Les lecteurs usagers inscrits séjourneurs clients étudiants utilisent les bibliothèques essentiellement pour leur salle de travail – « silence » au point d’acheter des casques de chantier anti-bruit coupant le piano, sur lequel s’acharnent des étudiant.e.s, déposé dans le hall ; chaleur, lumière, concentration, voir ses amis ou du moins des gens – comme les clodos. Les lectrices usagères inscrites séjourneuses clientes étudiantes jouent à la femme selon le modèle unique imposé en frappant du talon aiguille, qu’elles ne savent pas porter avec leurs jambes flageolantes, comme un flamenco de toc ou claquettes du pauvre – pathétique.
Interpopol, cette organisation, sise finalement à Tôkyôto© grâce à un coup de rouge sur repas gargantuesque, qui protégea Barbie, pote avec le dirlo fin années 70, dont la tête, un directeur chinois, fut enlevé, fut saisi, sans résultat. La ministre de l’enseignement supérieur et de l’éducation nationale, luttant pour être nommée Mme «la » Ministre, est venue constater avec un ami cher académicien prônant le Mme « le » Ministre : vert, l’Immortel© sèche ; un coup d’épée dans l’eau. Le rapport n’est pas plus favorable. En –thèque, le milieu professionnel est fortement féminisé avec force crépages de bourres=chignons qu’elles arborent inévitablement [5]. C’est la planque de nombreuses dingues, cassoc’ ou marginales, de tristes consensuel.le.s frustré.e.s, de profs raté.e.s, qui n’en ratent pas une pour donner des leçons aux autres qu’ils ne s’appliquent surtout jamais à eux-mêmes. Ces derniers, mal payés, fatigués de se fader des élèves, se recasent, malgré les rapports de jury de concours des bibliothèques soulignant cet écueil devenant un danger pour la profession, une fois qu’ils sont rentrés dans la fonction publique d’Etat : la bonne gâche pour le loup entré dans la bergerie. Idem pour les administratifs, insupportables avec le personnel des corps des bibliothèques. Pas besoin de thérapie aux rayons, les rayonnages calment, sauf les ambitions. Les cancers variés rongent le personnel vu l’ambiance confinée : bulle. Parfois, des personnes entrent par vocation – elles perdent vite la foi -, une partie du quota des chartistes est réservée aux conservatrices qui continuent parfois leur recherche qui n’intéressent qu’elles-mêmes. Peu sont de vieilles filles, certes à barniques=mirettes en glacis=lunettes comme dans les livres ou les films. Elles sont devenues des gestionnaires, parfois soucieuses de l’intérêt général mais surtout du leur ou stratégie à la Sun Tsu pour leur promotion, en grattant la rogne=flatter, comme le hamster dans sa cage préférant écraser sa concurrente, qui ne s’intéressent plus aux livres qu’elles ne voient plus et ne lisent même plus par manque de temps. Elles se livrent peu dans la clinique de la Forêt noire, dépeuplée à cause du papier d’une usine Seveso, comme celle de Tarascon, générant une odeur entre œuf pourri, soufre, pet et chou-fleur, sans compter les façades noircies, le rejet de cadmium, nuisible aux reins, de chlore dans Igor, les nausées, les maux de tête, les difficultés respiratoires, dont l’asthme, et les divers cancers.
Le maire – l’arbre et la médiathèque -, avec qui elle collabora au plus près, a fait un saut, rien. Le mystère demeure. Le squelette Gasper© s’agite. Il découvre qu’un étudiant s’est immolé à cause de sa difficile condition ; son visage sera intégralement greffé grâce à de la culture sur surface imprimée en 3D, Tôkyôto© le lui devait bien. La profession a inventé un énième concept fumeux emballant toute la communauté frustrée en demande, le « tiers lieu »[6] où il s’agit de retenir au maximum le lecteur usager inscrit séjourneur client, comme le visiteur de musée, à l’aide de services tels que cafés, lectures de détente, rédaction de CV, aides à l’écriture administrative, aux devoirs, à la formation bibliographique pour les mémoires ou thèses même quand le réseau plante – que l’usager inscrit, le séjourneur lecteur n’écoute pas pour revenir ensuite dans le module « bibliothécaire à la demande » ou « utilisez-moi », « louez-moi » en panneau d’homme-sandwich pour effectuer un travail en doublon -, yoga, etc. « Troisième lieu », l’expression moderne à l’Odette© car empruntée au monde anglo-saxon au profit d’une conservatrice thésarde et thésée qui a droit à son quart d’heure de célébrité dans l’avide microcosme, avant qu’une autre idée fumeuse, un poncif à la mode, longtemps, longtemps après, vienne la chasser mais Baudelaire est loin.
L’inspectrice Shift comprend que les étudiant.e..s présentent rapidement – deux minutes, douche comprise – dans des BarCamp®, leur thèse en autant de mots qu’un tweet® : c’est l’effet hub® et FabLab®. Le haut fait d’arme, suite à un voyage à l’étranger, sera de régler l’attente de places réservées par des personnes venues trop tôt, par un système de gestion du temps avec un carton à volant pour libérer la place au bout d’un laps défini.
- Les horaires d’ouverture ne correspondent pas, ils datent de l’année dernière remarque innocemment une lectrice.
- Les lecteurs n’ont qu’à savoir lire affirme de façon péremptoire la chargée des usagers.
Suggérer de distinguer imprimante et photocopieuse est perçu comme saugrenu alors que les étudiant.e.s confondent systématiquement, le papier étant souvent en rupture de stock.
Etonné.e, l’inspectrice Shift déduit que la dominante, c’est le management. Shift n’aimait pas le Tage Mage et la culture du chiffre. Des converties, ces vestales ayant reçu la lumière, s’extasient sur des camemberts aux tristes relents. Leur monde se divise en deux : celles qui encadrent et que personne ne peut encadrer ; celles qui n’encadrent pas ou monde d’en bas, le sublunaire aristotélicien. Les anges des Ailes du désir se sont fait la belle ; restent les anges gardien de la paix avec force contredanses et obsession du quantitatif comme inspecteurs des affaires finies. La machine à gaz est mobilisée en laps avec force stress pour rapports, dépouillement d’enquêtes, statistiques ou ESGBU sans compter les entretiens professionnels souvent avec un logiciel inadapté qui peut planter après une heure de saisie avant que tout ne soit régenté par des algorithmes. Les entretiens d’évaluation dits professionnels jugent la manière de servir, le taux de servitude, de bon command et d’aptitude à l’obéissance. La règle intangible : ne pas faire de vague, la loyauté à tout prix même dans l’abject[7], aucune tête ne doit dépasser[8], sauf celles bénéficiant de copinage ou corruption ordinaire. Etre Rantanplan© favorise sa carrière.
Pour l’inspectrice Shift, le personnel relève souvent du psychiatrique : l’une, gênée par d’insupportables acouphènes, suite à un coup du lapin dans un accident de voiture, se noiera sciemment dans le fleuve Grichka ; une autre se défénestrera depuis un bâtiment voisin – une enquête, sans responsabilités pointées, avait été tout de même diligentée ; l’autre, commandant de son poste de travail des bicornes napoléoniens en nombre, s’avalera du Destop® impliquant la pose d’une sonde à la place de l’œsophage avant de séjourner définitivement en hôpital psychiatrique après s’être fait chambré par ses collègues peu compréhensifs, sautant sur le bouc émissaire pour conforter le groupe. Une directrice prenait plaisir à insulter ses collègues en réunion et à les harceler. Une autre, dont l’ambition était puisée dans sa survie à la naissance de ses enfants, faisait des pétitions sur ses collègues pour prendre leur place – la stratégie du jeu de la chaise musicale se révéla payante même si d’autres directrices se plaignaient à l’impuissante inspection générale des bibliothèques du vol permanent des idées qu’elle s’appropriait, Ctrl C, Ctrl V. Une nullipare-qui-en-souffrait, qui le faisait bien payer, de formation philosophique, se valorisant à tout prix aux frais de l’Etat dans des congrès avec des pratiques non éprouvées qu’elle s’appropriait sur fond de féminisme à la mode, martyrisait ses subordonnées. Elle a fini par être virée d’une autre institution, dont elle nidifia le poste à la coucou, à force de se gaver de voyages gracieusement offerts pour représenter ladite institution en brassant du vent aux frais de la princesse. Autant dire que ces données sont peu valorisantes pour le service qualité selon la norme 9001 ou Charte Marianne, même si la -thèque se targue d’avoir gagné son label plutôt proche du label rouge, bien saignant.
L’inspecteur Shift saisit une conversation à la volée :
– Intelligent, c’est s’adapter – être efficient dit la catholique qui a démissionné de l’éducation nationale tout en briguant une promotion de catégorie A en bibliothèque au point de dénoncer ses collègues pour mieux s’affirmer.
– Seuls animaux – adaptés – théorie de l’évolution – cafards et moustiques, rend raison l’incriminé.e aka Dude aka Dikkenek, ayant marre de cette moraline néolibérale intériorisée et étendue sur fond de darwinisme mal assimilé.
– Arrête d’être contraçant rétorque le pot-à-tabac=brasset=saucisson de Bologne=la bedondaine=mâche-dru=capitonnée=godemarre=corsue=triquedondaine=grosse pleine de merde= l’hommasse=adipeuse à cause de la sédentarité devant son écran.
L’inspectrice Shift arrive à déterminer que ladite catholique avait laissé, dans une souillarde=un réduit sous l’escalier où étaient entreposés les produits de nettoyage, un bureau avec des tiroirs jonchés d’énormes rognures d’ongles et de quignons de pain moisis ; après elle, le déluge, question d’interprétation biblique. Bel accueil, non ? Elle sera évidemment bien perçue par sa hiérarchie, « une sainte », même, selon une cadre, une excitée, une autre prof ratée, une incompétente notoire en bibliothèque.
[1] Ce criminel qui déféqua sur le lieu du crime pour narguer la police a été confondu par Lacassagne car ses selles révélaient une bactérie rarissime, dont l’origine, exotique, était localisée. Tel est pris qui croyait prendre.
[2] Où la ville est peu épargnée dans Retour au désert par De Pange où les noms de quartiers sont des personnages. Citer le scandale d’un acteur d’une origine différente que celle citée en didascalie n’est pas ici l’objet.
[3] Grâce à la censure, après l’affaire des placards, établie par François Ier sous la forme de dépôt légal (1537) impliquant la présence automatique de publications, livres ou revues édités, dans une bibliothèque de référence (BNF ou BMVR). A noter que dès l’inauguration, la BNF – cet espace où le jardin est en prêt indirect, c’est-à-dire à toucher avec les yeux, notamment avec les arbres en bronze de Penone alors, qu’à l’intérieur, les arbres en carton de Jospin sont exposés – était victime d’infiltrations et d’inondations – seul un énarque peut émettre la géniale idée de construire une bibliothèque nationale au bord d’un fleuve car le terrain est vaste et moins cher dans le XIIIe à côté du Brouillard sur le Pont de Tolbiac où officia Nestor Burma, par un Mallet anarchiste mais antisémite, avant d’accéder au quartier chinois où loge Houellebecq en haut de sa tour dans sa salle perso de musculation après avoir fui les impôts au fin fond de l’Irlande ; des champignons ont contaminé les livres en magasin par la climatisation et l’aération interne.
[4] Comme le professeur Raoult-à-la-hydroxychloroquine, dans une revue qu’il dirige lui-même, ou de nombreux chercheurs chinois grâce au paper mills, une école dentaire indienne était montée dans les classements en publiant massivement des travaux d’étudiants enrichis de références bibliographiques citant cette école. La revue de référence The Lancet a une réputation affaiblie depuis 2020, après d’autres affaires comme dans Nature, à cause de la publication d’une étude controversée, un preprint, sur l’hydroxychloroquine dans le traitement du Covid, finalement retractée, par des détectives de la mauvaise science ou chasseurs de fraudes, puis retirée.
[5] Sauf avec l’actrice vieillissante aux terribles cernes dans Les Amants de Salzbourg (Interlude, 1957) de Douglas Sirk.
[6] Préférons le Tierce lieu d’Holder.
[7] Malgré la loi Anicet Le Pors sur la fonction publique.
[8] « Celui dont la tête dépasse de la foule reçoit le fruit pourri. » (Proverbe chinois).